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Page:Barbey d’Aurevilly – Du dandysme et de Georges Brummell.djvu/69

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donne la main au naturel. Seulement, ses moyens de faire effet étaient de plus haut parage, et c’est ce qu’on a trop, beaucoup trop oublié. On l’a considéré comme un être purement physique, et il était au contraire intellectuel jusque dans le genre de beauté qu’il possédait. En effet, il brillait bien moins par la correction des traits que par la physionomie. Il avait les cheveux presque roux, comme Alfieri, et une chute de cheval, dans une charge, avait altéré la ligne grecque de son profil. Son air de tête était plus beau que son visage, et sa contenance, ― physionomie du corps, ― l’emportait jusque sur la perfection de ses formes. Écoutons Lister : « Il n’était ni beau ni laid ; mais il y avait dans tout sa personne une expression de finesse et d’ironie concentrée, et dans ses yeux une incroyable pénétration. » Quelquefois ces yeux sagaces savaient se glacer d’indifférence sans mépris, comme il convient à un Dandy consommé, à un homme qui porte en lui quelque chose de supérieur au monde visible. Sa voix magnifique faisait la langue anglaise aussi belle à l’oreille qu’elle l’est aux yeux et à la pensée. « Il n’affectait pas d’avoir la vue courte ; mais il pouvait prendre, ― dit encore Lister, ― quand les personnes qui étaient là n’avaient pas