Page:Barbey d’Aurevilly – Le Chevalier Des Touches, 1879.djvu/47

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vos grosses bottes de gendarme, et vous montez toujours à califourchon votre pouliche pour le compte de la maison de Bourbon ?…

Mademoiselle de Percy avait été une des amazones de la Chouannerie. Elle avait plus d’une fois, sous des vêtements d’homme, servi d’officier d’ordonnance ou de courrier aux différents chefs qui avaient insurgé le Maine et voulu armer le Cotentin. Espèce de chevalier d’Éon, mais qui n’avait rien d’apocryphe, elle avait, disait-on, fait le coup de feu du buisson avec une intrépidité qui eût été l’honneur d’un homme. Bien loin que sa beauté ou la délicatesse de ses formes pût jamais révéler son sexe, sa laideur avait pu même quelquefois effrayer l’ennemi.

— Je ne suis plus qu’une vieille fille, inutile maintenant, dit-elle en répondant avec une mélancolie qui n’était pas sans grâce à la plaisanterie de son frère, et je n’ai pas même un pauvre petit bout de neveu dans les Pages à qui je puisse léguer la carabine de sa tante ; mais je mourrai comme j’ai vécu, fidèle à nos maîtres et ne pouvant rien entendre contre eux.

— Tu vaux mieux qu’eux et que nous, Percy ! dit l’abbé qui admirait ce dévouement, mais qui ne le partageait plus. Il appelait toujours sa sœur par son nom de Percy, comme si elle avait été un homme, et il y avait dans cette habitude