Page:Barbey d’Aurevilly - À côté de la grande histoire, 1906.djvu/128

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romancier, en effet, si créateur qu’il ait été, qui jamais, à notre connaissance, ait atteint à la sombre épouvante de ces deux types, Élisabeth de Platen et Sophie-Dorothée, après leur crime, — l’une, vieillissant, désolée, jusqu’à l’âge de quatre-vingt-sept ans, aveugle et tête à tête avec ses remords dans les ténèbres de sa cécité, vomissant enfin son cœur dans une confession qu’elle autorisa son confesseur à publier, et l’autre, plus tragique encore sous l’imposture de son innocence, soutenue trente-deux ans avec la persévérance de l’enfer ! Ces deux têtes historiques, aux méplats creusés et noirs, plus difficiles à fouiller que le marbre, il faudrait une espèce de Michel-Ange pour les sculpter dans un livre d’histoire magistral. Au lieu de cela, nous avons Blaze de Bury et le badigeon d’un trumeau. Seulement, tel qu’il est, ce trumeau, il est impossible qu’un jour ou l’autre la page d’histoire inconnue qu’il représente ne tente pas l’imagination d’un poète ou la sagacité d’un penseur.