Page:Barbey d’Aurevilly - À côté de la grande histoire, 1906.djvu/214

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de ces petites adresses et il n’en a pas besoin. Il écrit l’histoire pour l’histoire, sans esprit de retour et sans allusion. Aujourd’hui, l’Italie ne brûlerait pas encore de son dernier combat contre l’Autriche, que Renée n’en publierait pas moins la vie d’une femme qui, au Moyen Age, a résumé l’Italie dans sa plus opiniâtre résistance à la race allemande, et qui mérita d’être appelée « la Grande Italienne ».

Dans quelque temps que ce pût être, cette grande figure historique, enfoncée et comme perdue en des chroniques qu’on ne lit plus, mais entrevue d’abord et finalement déterrée, aurait passionné de sa beauté singulière toute imagination qui serait restée poétique sous les formes sévères et sobres de l’histoire et de l’érudition. Or, justement Amédée Renée est une de ces imaginations éternelles. Lui, l’auteur des Nièces de Mazarin, de Madame de Montmorency, et, dans son Louis XVI, de ce portrait de Marie-Antoinette qui seul vaut une biographie, lui qui semble avoir spécialement jusqu’ici l’intelligence et le goût des femmes dans l’histoire, ne pouvait pas, puisqu’il abordait le Moyen Age, oublier une des plus purement grandes qui aient jamais existé… Aussi l’a-t-il peinte comme il sait peindre et nous l’a-t-il donnée.

Et ce n’est pas non plus au temps qui passe qu’il l’a donnée, car pareille histoire restera. Elle restera, oui ! même quand l’auteur qui l’a écrite n’aurait pas le talent qui brille dans son livre. Elle restera parce