Page:Barbey d’Aurevilly - À côté de la grande histoire, 1906.djvu/48

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vous le nom ?… C’est le recueil des bulletins et des pensées militaires de Souvarof, l’homme unique de ce pays dont la grandeur soit naïve, sauvage, tartare, et non du plaqué de civilisation plus ou moins réussi. Certes ! si Catherine le Grand vivait en l’an de grâce 1854, que penserait-elle du mot flatteur des philosophes :

C’est du Nord aujourd’hui que nous vient la lumière,


et qu’elle n’acceptait de son temps que comme une espérance, un chant du coq, un point du jour ?… Qui sait si ce mot trop antidaté ne lui paraîtrait pas une ironie, et si le désappointement pour son pays n’enverrait pas un noble nuage de tristesse sur ce petit front carré dont le prince de Ligne disait avec raison : « D’une tempe à l’autre, voilà l’empire ! »


III


Nous ne sommes pas plus heureux en mémoires privés qu’en histoire générale et qu’en roman. Les Mémoires secrets du sieur de Villebois sur la cour de Russie pendant les règnes de Pierre le Grand et de Catherine Ire[1], publiés par le comte Hallez, n’ont point satisfait une curiosité qu’on avait d’abord excitée. On disait, en prenant des airs de discrétion charmée,

  1. Dentu.