Page:Barbey d’Aurevilly - L’Ensorcelée, Lemerre, 1916.djvu/181

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X

C’est à l’époque dont maître Louis Tainnebouy, le brave fermier du Mont-de-Rauville, me parlait en ces termes, qu’un soir la vieille Clotte, qui avait filé à sa porte une bonne partie de la relevée, arrêta, fatiguée, le mouvement de son rouet. Elle regarda autour d’elle et appela la petite Ingou.

« Petiote ! » — fit-elle.

Mais Petiote ne répondit pas. La maison de la Clotte, détruite maintenant, s’élevait à peu de pieds de terre, sur la route qui conduisait de Blanchelande au bourg de Lessay, et elle n’avait pour voisinage, à deux ou trois portées de fusil, sur le bord opposé du chemin, que la chaumière de la mère Ingou, dont la petite fille venait, chaque jour, aider la Clotte dans son pauvre ménage. Ce jour-là, cette petite, qui avait de bonne heure rangé le fait de la vieille Clotte, tentée par la beauté de la soirée et ces derniers rayons du soir qui conseillent le vagabondage, avait pris ses sabots sans bride à chaque main, et s’était mise à dé-