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Page:Barbey d’Aurevilly - L’Ensorcelée, Lemerre, 1916.djvu/96

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promptement le groupe de maisons qu’on appelait le bourg et qu’elle habitait. Quand elle repassa dans ce cimetière ceint de murs qui s’écroulaient et qu’on oubliait de relever, où de hautes herbes, qu’aucune faux jamais ne coupait, se courbaient au souffle du soir comme une moisson mortuaire ; lorsqu’elle entendit quelques corbeaux croasser dans les ouvertures grillées du clocher, par ce déclin d’un jour d’hiver, gris et bas, l’âme ouverte à tous les sentiments d’une nature religieuse, ignorante et timide, Nônon se félicita, en se serrant dans son mantelet de ratine blanche, de n’être pas à cette heure au Vieux Presbytère et dans la chemise de Jeanne Le Hardouey.

Celle-ci cependant marchait, le cœur ferme comme le pas, accoutumée à tous les chemins des environs, qu’elle avait maintes fois parcourus, soit à cheval, soit à pied, depuis qu’elle était mariée, et même bien avant qu’elle le fût, et d’ailleurs trop préoccupée, ce jour-là, pour s’inquiéter soit des mauvaises rencontres, soit des endroits de la route d’une suspecte réputation.