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LE THÉATRE

II

Disons-le tout d’abord, ils ont tous très intelligemment et très chaudement joué. Ces acteurs de la Gaîté, avec lesquels les Ponsardins du ThéâtreFrançais ou de l’Odéon prendraient peut-être des airs, ont mieux joué que ces Ponsardins. Ils ont joué en se moquant de la tradition momie qu’ils ne connaissent pas et dont ils se fichent bien 1 Ils ont joué comme les soldats se sont battus à Solférino, à Solférino qui n’est plus une bataille d’officiers, mais de simples soldats ! Mademoiselle Duguéret, en robe verte, agrémentée de blanc, qui, sa tête ardemment pensive, appuyée sur sa main, les écoutait aux premières loges dans une pose charmante, avait l’air de regretter de n’être pas avec eux… Alexandre, que je ne connaissais pas, car, avec l’âge d’un vieux soldat, je suis un conscrit dans la Critique de Théâtre ; Alexandre, le célèbre créateur du rôle de la mère Moscou, — un type à l’Eugène Sue, — et que, pour cette raison, il faut nommer le premier, a joué avec une largeur et une rondeur de gaieté qui ont fait onduler et vibrer le rire, à chaque instant, dans toute la salle. Mais qu’il me permette de le lui dire, à ce brave