Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/215

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encore dans les diverses poussières où les porta une tempête qui ne les éteignit pas. La Chine, nonobstant, est de tous les pays du globe celui-là où la Philosophie et la Science, et par conséquent la Morale, leur fille stérile, ont le plus piétiné ces débris de flambeaux renversés. Les bonzes à la Chine, les bonzes, qui sont les calotins de l’endroit, ont été effacés par messieurs les mandarins, qui en sont les littérateurs et les philosophes. M. Martin a donc agi avec une vigueur de procédé qui l’honore en retraçant d’abord, et avant toutes les autres nations, la Chine et l’influence qu’y exerce la morale, pour montrer que la morale est quelque chose en soi, car elle y est tout, et après l’avoir montré, M. Louis-Auguste Martin, l’auteur de plusieurs ouvrages, pourra se dispenser d’en faire un de plus !


II

Et il n’y a point ici de confusion. La morale qu’adore M. Martin et dont il entreprend l’histoire est bien la morale telle qu’on l’entend en Chine, cette morale athée qui charma, quand il la découvrit, tout le dix-huitième siècle, qui se connaissait à cette morale-là. C’est cette morale enfin que certains esprits du dix-neuvième siècle professent encore aujourd’hui, en prenant la peine de la détacher adroitement de toute philosophie, comme elle était déjà détachée de toute religion. Or c’est précisément ce détachement, cet isolement de tout système de philosophie, qui fait le danger