Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/344

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

le Père suprême, qui n’est plus vêtu de bleu, mais de noir, parle doux, comme l’huissier de Molière :

Il est vêtu de noir et parle d’un ton doux,

à en croire cette déclaration, l’Église saint-simonienne existerait. Et non-seulement elle existerait, mais elle ferait ses œuvres de miséricorde ; elle fonctionnerait, elle officierait comme Église parmi nous qui ne la voyions plus et qui la tenions pour morte et déshonorée sous des jugements de police correctionnelle, genre de martyre, celui-là, qui n’aurait pas convaincu Pascal ! M. Enfantin nous l’affirme. Seulement, c’est trop peu ou ce n’est pas assez que sa déclaration d’aujourd’hui. Puisqu’il apporte ici une parole dont il ne se servait plus depuis longtemps, nous lui demanderons où se tient cette Église dont il parie comme d’une force organisée et agissante ? Puisqu’il dit nous avec cette pompe, nous lui demanderons quel est le nombre des adhérents à la foi saint-simonienne qui soient prêts à la confesser ? Puisqu’il fait le saint Paul, qu’il l’imite jusqu’au bout ! Saint Paul savait le nombre des chrétiens d’Ephèse, de Corinthe, de chez les Galates… Si vraiment l’Église saint-simonienne est une réalité, si effectivement M. Enfantin représente la foi, la volonté, le consentement de plusieurs, en faisant la déclaration scandaleuse qu’il vient d’opposer tout à coup à l’enseignement d’un prêtre catholique, orthodoxe et respecté, nous dirons qu’il nous importe, à nous chrétiens, de savoir le danger qui nous menace, et si tout cela, comme nous le pensons bien plutôt, n’est que rêverie de visionnaire attardé qui ne peut guérir