Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1862.djvu/31

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Enfin l’amour, l’amour, l’amour trouble et affaiblit tellement la raison du poète, qu’il le répand sur la nature, à tort et à travers, non plus comme un vase qui déborde, mais comme un vase qui a une fêlure et qui coule :

J’aime (s’écrie-t-il), j’aime l’araignée et j’aime l’ortie,

Parce qu’on les hait,

Et que rien n’excuse et que tout châtie

Leur morne souhait. Parce qu’elles sont prises dans leur œuvre ;

O sort ! fatals nœuds !

Parce que l’ortie est une couleuvre,

L’araignée un gueux ! Pour peu qu’on leur jette un œil moins superbe,

Tout bas, loin du jour,

La vilaine bête — et la mauvaise herbe

Murmurent « amour ! » Tel, en toute vérité, est ce premier volume où la bucolique aplatit et tue l’élégie, et où, si vous exceptez une ou deux pièces, entre autres celle que le poète intitule : Magnitudo parvi, et qui est bien la plus belle amplification du vide à coup de dictionnaire de rimes, tout est dans le ton écœurant et guindé que nous venons d’indiquer. Du reste, les Corybantes de M. Hugo ne vantent eux-mêmes que deux poésies de ce volume (deux sur presque cent !!), Le Rouet d’Omphale et La Fête chez Thérèse, mais La Fête chez Thérèse n’est qu’un Watteau, calqué à la vitre et mis en vers avec assez de bonheur, et le bas-relief