Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1862.djvu/69

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dans sa variété, a commencé par le doux génie de Racine, si suave dans sa correction, et c’est M. Alfred de Vigny, le précurseur du Romantisme, qui a été ce Racine-là !

Et qu’on n’aille pas plus loin que ma pensée ! Quand je dis que M. de Vigny est le Racine du Romantisme, je n’entends nullement établir de comparaison et de hiérarchie entre la littérature du XVIIe siècle, qui est une chose, et celle du XIXe siècle, qui en est une autre. Je ne rallume pas de feux éteints. Je ne provoque point aux batailles. Je veux rapprocher deux hommes placés dans des milieux différents sur lesquels ils ont influé, chacun à sa manière, et qui ont même participé à la création de ce milieu ; je veux simplement mettre en regard deux organisations analogues, supérieures toutes deux par une délicatesse exquise et une très-grande force, — une force qui donne d’autant plus de plaisir qu’elle est cachée sous la grâce et sous l’harmonie.

Mais je ne veux pas traiter la question de savoir lequel est, absolument, le premier de ces deux hommes, occupé uniquement que je suis de faire saillir les ressemblances de leur génie, ce qui suffira, du reste, encore, pour la gloire de celui qui n’est pas le premier des deux.

II

Il ne s’agit donc ici aujourd’hui que de M. Alfred de Vigny, le poète. Il ne s’agit que de la partie de ses