Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1889.djvu/123

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connaître, le silence s’est fait sur la chose. L’affaire se serait-elle arrangée C’est là ce que nous ignorons. Mais ce que nous savons, c’est que c’était là une bonne occasion pour les batteurs d’œufs de cette omelette soufflée qu’on appelle l’actualité de reparler de Henri Heine, dont, sans cela, je vous en réponds ! ils ne diraient jamais un mot. Henri Heine ! Qu’est-ce, pour eux, que Henri Heine î La première cocotte à cheval, au bois, et même le cheval sans la drôlesse dessus, les intéresse bien plus qu’un homme de génie mort il y a déjà trente ans, et dont la gloire, comme toutes les gloires, dans ce plat monde de bavarderie superficielle, n’est plus qu’une silencieuse momie.

Mais nous qui méprisons l’omelette soufflée et qui avons donné l’asile de ce livre à la littérature, — cette reine exilée, — nous voulons parler aujourd’hui de Henri Heine, et, qui sait ?… peutêtre de manière à désarmer et à faire accepter sans horreur l’idée d’une publication qui a blessé en madame Heine des susceptibilités très nobles, mais qu’il aurait été plus digne du génie de son mari de ne pas écouter. Le génie de son mari, voilà ce que devait voir exclusivement madame Heine, parce que, dans le jugement de la postérité, Henri Heine, comme tous les poètes, ne comptera que par son génie, lequel ne sera pas détruit par une correspondance privée, même écrite sans talent, ce qui, pour un homme comme lui, serait le tort suprême. Qu’importent, en