Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1889.djvu/174

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parce qu’elle est athée, elle doit certainement être plus fière de l’adjectif que du substantif dans le titre qu’elle a donné à ses poésies. Je ne sais point par quelles spirales cette amie de Proudhon est descendue au fond du dernier cercle de l’enfer de la Philosophie, mais elle y est descendue, et c’est du fond de cet horrible trou que, comme la Sachette de NotreDame de Paris, elle élève une voix désespérée pour l’humanité et pour elle ; — car, après tout, si elle a la bravoure de l’athéisme, si elle fait de l’héroïsme contre le néant, elle n’est pas, pour cela, très heureuse d’être athée. Cette nécessité philosophique du néant exaspère son âme, qui a soif d’infini puisqu’elle est poète, et si elle l’accepte, cette nécessité, comme philosophe, comme poète, elle la maudit

III

Elle la maudit, — et voilà justement pourquoi cette poésie, comme je l’ai dit plus haut, n’est pas dange reuse. Elle maudit !… Maudire n’est pas séduire. Si puissante qu’elle soit, cette poésie, elle crispe l’âme, mais sans l’entraîner. Elle donne horreur de l’implacable Erreur qu’elle chante et à laquelle elle ne fait