Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1889.djvu/205

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n’étant pas transparentes. Or, cet accent, qui l’a jamais eu plus que l’auteur des Névroses ? Si cet accent ne vous pénètre pas, tout est dit. On ne discute point un accent ; on le sent ou on ne le sent pas… Je vous montre un chêne, — un vrai chêne. Vous dites que ce n’est pas un chêne. Je ne peux pas vous le prouver et je n’ai plus qu’à vous tourner les talons. Je sais bien que dans le cas particulier de l’auteur des Névroses et de l’auteur des Blasphèmes, la Critique avait une espèce de mauvaise raison pour les accuser ouïes soupçonner d’histrionisme dans leurs vers, et c’était, pour tous les deux, l’exhibition de leurs personnes, l’un dans les salons de Paris, et l’autre, résolument acteur, sur un théâtre, devant le public des théâtres. Mais c’était une mauvaise raison. On ne peut pas retourner ce qui est de la personne contre le poète, quand il y a poète dansun homme. La vie de la pensée et la vie de l’action vulgaire bifurquent et ne s’impliquent point. Quels que soient doncles antécédents dans la vie de M. Richepin, quels que soient son passé et son caractère, qu’on n’a pas à juger ici, il est poète dans ses vers, il y a la sincérité du poète, et c’est à l’évidence de V accent qu’on le reconnaît, et que, sans cette méprisable envie, le cancer de la littérature, on l’aurait, à la première vue, universellement reconnu.

Et d’autant plus que c’est l’esprit du temps qui chante dans sa voix, seulement l’esprit du temps relevé dans le poète, puissancialisé, poussé au sublime,