Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/128

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qui palpitait sous la question individuelle. Le croira-t-on ? avec ses habitudes d’histoire, il ne s’est pas rappelé que les nationalités s’écroulent en proportion de leurs atteintes au mariage. Lui qui revient d’Égypte, — qui sait l’Égypte à fond, dit-on, — il ne s’est donc pas demandé, avant d’écrire son roman, pourquoi les lois de l’Égypte punissaient de mort l’adultère, si ce n’est parce qu’elles savaient, ces lois sages, que tout adultère, même celui qui dort le mieux dans l’affreuse innocence de son crime, est toujours armé, décidé à tout et à priori assassin ? Il n’a pas étendu jusque-là son horizon d’artiste.

La longévité des nations qui traversent le temps et qui ont toutes cherché à défendre le mariage et la légitimité paternelle comme la source même de leur double vie, l’Antiquité, par l’eunuchat, cette invention du désespoir, dégradante et terrible, et le Christianisme, qui a transfiguré toutes les institutions antiques par un autre eunuchat volontaire qui retranche, avec la volonté, la convoitise du cœur de l’homme et crée une atmosphère de pudeur inconnue avant Jésus-Christ, cette longévité relative des nations ne lui a rien appris pour, dans cette occasion, s’en souvenir ! Il a oublié que partout où le sentiment baisse, le paganisme, qui n’est pas de l’histoire et de l’archéologie, mais bel et bien de la nature humaine éternelle, le paganisme remontait ! Homme moderne, quoiqu’il ait besoin d’échapper à la préoccupation moderne, — l’individualisme du Contrat social, de Rousseau, — il a trouvé une situation et il l’a exploitée, mais il s’est circonscrit, il s’est calfeutré dans cette situation. Mais entre le mari et l’amant,