Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/311

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est profonde. Celle-ci accuse le servage de l’esprit dans la conception de l’héroïne d’un livre, c’est-à-dire dans son personnage le plus important. Ce personnage manque de nouveauté, et la situation seule dans laquelle il est placé diffère de la situation de Mme Bovary dans M. Flaubert. C’est là-dessus que les auteurs du livre se sont retirés. Il y a, comment dirai-je ? deux situations ou deux spectacles dans le livre d’Antoine Quérard, que M. Flaubert n’a point abordés et devant lesquels peut-être aurait-il reculé. Ce sont les deux infanticides, accomplis l’un après l’autre par le docteur Quérard. Le premier réussit, mais au second la malheureuse Rosette succombe. Il fallait bien que le roman finît, et on ne pouvait pas, quelque talent qu’on eût pour peindre ces hideurs physiques, prolonger indéfiniment le pathétique des avortements !


IV

Tel est ce livre d’Antoine Quérard, je ne dirai pas dans sa pensée, car j’en ignore la pensée, et dont je vous ai épargné les détails. La pensée d’un livre, l’idée qu’il exprime, la notion de vérité qu’il laisse dans l’esprit, une fois l’émotion apaisée, toutes ces choses, les réalistes en font peu de cas. Peindre pour peindre, décrire pour décrire, voilà leur visée, une visée très-courte, quand on l’entend comme eux, car ce n’est