Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/379

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que les autres, de cela seul (comme le mot le dit) qu’elles sont au-dessus.

M. Emile Montégut l’a très-bien montré dans l’excellent fragment dont M. Bernard-Derosne a fait la préface de sa traduction. Quelle différence entre Guy Livingstone et les autres romans contemporains, et surtout ceux-là (il faut le dire) qui se publient dans notre pays ! Ici, dans ce livre, où tout palpite haut, que nous sommes loin des tapis francs, de la Bohême, des cabotines, des drôlesses aux camélias et des demi-mondes ! Au moins, si les caractères créés par l’auteur de Guy Livingstone sont coupables, leurs fautes ou leurs crimes ont de la grandeur. S’ils n’ont pas cette moralité qui est le dernier degré de l’art et de la difficulté pour un romancier ou un poëte, car l’homme qui se cherche dans tout ne s’intéresse guère à ce qui est irréprochable, au moins leur idéalité est-elle à moitié chemin de cette moralité, presque impossible à introduire, dans un roman ou dans un poëme sans le plus rare et le plus incroyable génie, car Richardson lui-même, qui a créé Lovelace, a raté Grandisson !


III

De plan et de combinaison, le roman de M. Lawrence a la simplicité d’une biographie. Guy Livingstone est un Anglais de ce temps, que le romancier prend à l’Université et suit jusqu’à sa mort, laquelle arrive de bonne heure et en pleine jeunesse. L’