Page:Barbey d’Aurevilly - Portraits politiques et littéraires, 1898.djvu/154

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144 PORTRAITS POLITIQUES ET LITTÉRAIRES trine, commence à se dégager et à apparaître. Et plus tard, quand Chateaubriand écrivit VIlinéraire, quand il nous raconta Rancé, ce Rancé(}i n’est pas un livre mais une chiffonnière de pensées, et qu’il traça ces pages désespérées et cruelles sur le néant des lettres d’amour qui ne Unissent jamais assez tôt au gré de nos misérables cœurs fatigués, c’est partout René, le vivace et rimtnortel Renél Enfin, et plus qu’ailleurs, dans ces vastes Mémoires d’outre- tombe qui sont le monument de toute la vie de Chateaubriand et le défilé du xix« siècle, le René du roman qui est son histoire et son être revient sur lui, à travers tout, et donne à tout l’accent inouï qu’on n’a plus oublié dès qu’on l’a entendu et qui se replace sous sa plume avec acharnement. Écoutez-les, ces glorieux Mémoires d’oulre-lombc, et dans ce ramassis historique des hommes et des choses de son temps qu’il pousse devant lui, vous entendrez les pieds méprisants de René comme quand il poussait les feuilles sèches tombées à l’automne, dans les bois de Combourg ! Et, de fait, cette personnalité de René est si profondément celle de Chateaubriand, que les événements les plus heureux, les plus éloignés, par les côtés positifs, du dégoût et de l’ennui qui sont son mal irrémédiable, n’ont pu venir à bout de cette âme malade d’infini, dans les gloires finies de la vie ! Destinée curieuse et sans égale qui met encore plus en relief lu force de cette personnalité, toutes lespros-