Page:Barbey d’Aurevilly - Portraits politiques et littéraires, 1898.djvu/18

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Shakespeare, mais en plus il a une foule de nuance.^ que Shakespeare n’a pas et ne pouvait avoir, puisqu’elles viennent d’une civilisation et d’une éducation beaucoup plus raffinées que l’éducation et la civilisation de Shakespeare ; et voilà qui lui constitue déjà, de fait, sinon de mérite original et personnel, une première supériorité que nous voulons bien ne pas compter, mais qui compte cependant ; car, en littérature comme en politique, on est bien obligé, quoi qu’on fasse, de tenir pour quelque chose les résultats.

III

Ainsi, j’insiste sur ce point, parce qu’il est réel : Shakespeare et Balzac sont deux imaginations du même ordre qui ont fait la même chose sans se ressembler, qui ont étreint jusqu’aux larmes et jusqu’au sang la nature humaine et lui ont fait sortir du cœur tout ce qu’elle a dans le cœur ! Et cela non pas une fois, deux fois, dix fois, mais cent, mais toujours ! dès qu’ils l’ont saisie avec leurs redoutables mains. Comme cette nature humaine, finie par un côté, mais infinie par l’autre, est toute semblable à l’alphabet,