Page:Barbey d’Aurevilly - Premier Memorandum, 1900.djvu/181

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temps perdu ? — B part pour Rouen, c'est-à-dire pour le château de Bellefosse, aux environs. — il n'y a que moi seul qui reste à Paris, d'où jamais la campagne ne m'a paru aussi belle parce que je ne peux y aller.

Après le départ de B refourré au travail jusqu'à sept heures. — supprimé le dîner, aussi l'esprit léger et les nerfs en bon état. — à sept heures, coiffé, habillé, sorti. — au faubourg saint-Germain chez le libraire. — en passant vu Théb mais pas Mme  H aux yeux de turquoise sur de la nacre et à l'air si mollement catin. — passé à Corazza. — pris du café et du kirsch dans de l'eau glacée. — monté au boulevard. — comme je regardais fort attentivement des jeunes filles à travers les rideaux d'un magasin, une voix a dit à mon oreille : «  que faites-vous donc là, ma biche ? »

— comme je ne

suis la biche de personne, je me suis très majestueusement retourné pour voir d'où venait l'expression caressante. Mais quelle confusion, non pour moi, mais pour elle ! — «  ah ! Monsieur, je vous demande pardon, » a-t-elle dit en se cachant la figure de son mouchoir et en faisant mine de beaucoup rire, ce qui est le comble de l'embarras chez les femmes. — puis elle s'est sauvée. — ne l'ai pas suivie, dégoûté de ce manque d'aplomb et de grâce. — belle femme du reste, et bien mise, mais un lion je crois.