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IV

Ô mon ami, mon cher Léon, ce jour, sinistre dans sa gaîté, pour moi, est rempli, pour toi, de joies saintes ! Pour toi, il fait flamber plus fort l’encens de ton cœur embrasé ; pour moi, dans le mien, il ne remue, du bout de son doigt ennuyé, que des cendres éteintes. Ô Prêtre heureux ! ô Prêtre heureux ! quand, dans ta stalle de Saint-Sauveur, sous les vitraux qui tamisent pour moi tant de pensées, avec la lumière, tu chantes ton Seigneur Dieu, aux longues après-midi des vêpres, tu n’as jamais fermé une seule fois le missel orné de rubans, et baissé le front sur ta poitrine, couverte du surplis tranquille, pour rêver aux jours de ta jeunesse, — et à moi, ce jour, comme un bourreau masqué, apporte la tête de la mienne !

C’est le jour des Masques pour moi, — pour toi, le jour des Quarante Heures !

Le Dimanche du Carnaval 1859.