Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/11

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puis elle est un peu longue, cette histoire, et le vent devient bien frais sur la rivière. Je ne me soucie pas du tout d’attraper une extinction de voix pour vous faire plaisir.

— Si ce n’était que cela, nous pourrions rentrer, dis-je modestement sans appuyer, car la curiosité m’avait rendu insinuant comme l’ambre de son collier et souple comme sa mitaine.

— Mais ce n’est pas que cela, — fit-elle mutinement. — Ce balcon me plaît et j’y veux rester !

Évidemment elle était outrée. Et elle avait raison ! J’étais un impertinent avec ma rêverie, qui n’était pas pour elle ! Je lorgnais encore du coin de l’œil le médaillon qui me fascinait, et je me tus pendant quelque temps.

Ce temps dura trop à son gré. — Tenez ! regardez-la, dit-elle ; — et, détrônant de son sein le médaillon, elle me le tendit d’une main qui semblait généreuse, mais qui voulait tout simplement tisonner un peu dans mon âme pour savoir combien il en sortirait d’étincelles !

Cléopâtre coquetant avec l’aspic qu’elle s’appliquait devait être piquante. Mais ici Cléopâtre appliquant l’aspic à un autre… n’était-ce pas infiniment mieux ?…

— Allons ! ne vous faites pas prier. Regardez-la ! je vous le permets. Elle est réellement