Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/156

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charmaient et pénétraient d’un attendrissement ineffable l’âme de ce généreux enfant. « Ils sont tout l’un pour l’autre, se disait-il, voilà pourquoi ils s’aiment. » Et, tenté par cette belle coupe d’affection, à laquelle ils se désaltéraient, il se retenait pour ne pas leur dire : « J’en suis. Partageons même les pierres que vous jette le monde. Partageons. » Pauvre Néel ! il buvait l’amour à une source bien dangereuse ! Il pensait que l’impie Sombreval venait d’appeler Calixte une sainte, et il se persuadait que cette sainte qu’il avait vue prier à l’église le matin même et pardonner à Julie la Gamase pourrait racheter le crime de son père et le ramener au repentir. Son esprit ardent acceptait cette idée.

Quoiqu’il fût depuis bien peu de temps dans la vie de ces deux êtres si longtemps maudits, il commençait d’entrevoir la mission de vertu expiatrice que Calixte s’était donnée, et l’enthousiasme pour cette divine créature s’ajoutait à son amour pour elle et allait en faire un de ces sentiments adorables et terribles — inconnus maintenant dans les cœurs.