Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/303

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profondes pour faire craindre des cicatrices. Le médecin, aidé de Sombreval, dont la force lui fut d’un grand secours, réduisit les os et mit les premiers appareils sur les plaies. Néel, au milieu des plus vives douleurs, ne sentait pas son mal et ne pensait qu’à Calixte… Lorsque le médecin fut parti, Sombreval, qui voulait scruter les impressions de sa fille, l’amena au bord du lit du jeune homme : « Je le mets sous la garde de tes soins, » lui dit-il ; et il les avait laissés seuls.

On voyait encore sur le visage de la jeune fille les traces de l’épouvantable terreur qui l’avait fait s’évanouir à la fenêtre.

— Ô Calixte ! — lui dit Néel rayonnant de la voir si émue, — me pardonnerez-vous ?

— Vous pardonner ? — fit-elle étonnée.

— Oui, — reprit-il — je voulais mourir. Je souffre tant depuis que je vous aime ! Je suis parti ce matin de Néhou avec la ferme résolution de me briser à midi sur le perron du Quesnay, — et il ajouta avec une joie presque fière, — je viens d’accomplir mon dessein.

— Oh ! — dit-elle, comme si une lueur affreuse l’avait pénétrée, et elle se cacha la figure dans ses mains pour se soustraire à ce qu’elle voyait.

— Je voulais mourir devant vous, — reprit Néel, qui continuait de frapper sur cette âme