Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/351

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Dieu dans les cheveux !… C’est cette main-là que j’ai sentie me lever de terre et me porter ici pour te jeter ce dernier cri : « Aie pitié de ton âme, Jean ! »

Tu as renié comme Pierre, mais Pierre a pleuré. N’imite pas Judas, toi qui as été un apôtre : n’aurais-tu donc plus rien d’un homme ? N’y aurait-il donc plus rien, — ce qui s’appelle rien, — que je puisse remuer dans cette poitrine que j’ai tant réchauffée contre la mienne, quand tu étais petit ?…

Et avec l’autorité familière et tendre d’un mère, elle caressait de sa main sèche cette poitrine d’Ésaü qu’il avait à moitié nue, car, à son fourneau, Sombreval se mettait à son aise comme un forgeron. À la voix de la Malgaigne, il était venu tout à coup comme il était là-haut, cette nuit-là, avec sa chemise ouverte, sa cravate rejetée, et ses cheveux balayés de son front jupitérien par l’ardente main de la Préoccupation.

Mais il n’y avait plus que les foudres de la matière qui pussent pénétrer dans cette poitrine endurcie :

— Si Calixte y a perdu ses larmes, tu me pardonneras de ne pas t’écouter, ma vieille mère, — dit-il avec une bonté calme qui expirait au bord du mépris, mais qui n’y entrait pas.