Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/94

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l’Innocence et de l’Expiation… Les pâleurs de la colère de Néel n’étaient que des roses lavées par les pluies en comparaison de la pâleur surnaturelle de Calixte. Comme un vase d’un ivoire humain trop pur pour résister aux rudes attouchements de la vie, son visage, plus que pâle, était simplement encadré par des cheveux d’un blond d’or clair, relevés droit et découvrant les tempes douloureuses, — coiffure inconnue à cette époque, et que la malheureuse enfant avait inventée pour s’épargner les sensations, insupportablement aiguës, que le fer et la torsion causaient à ses cheveux ; — seulement, chose étrange ! il était surmonté d’une bande de velours écarlate, qui rendait plus profonde et plus exaspérée son étonnante pâleur.

Trop large pour être une parure, ce ruban écarlate qui ceignait cette tête d’un blanc si mat et passait tout près des sourcils figurait bien la couronne sanglante d’un front martyr. On eût dit un cercle de sang figé — laissé là par de sublimes tortures — et on aurait pensé à ces Méduses chrétiennes dont le front ouvert verse du vrai sang sous les épines du couronnement mystique, comme nous en avons vu couler, en ces dernières années, du front déchiré des Stigmatisées du Tyrol. Elle aussi était stigmatisée ! Elle ne l’était pas par l’amour qui a de-