Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/167

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trines où je crois qu’il repousse ! Ce fut long comme la lutte de l’Ange et de Jacob. L’Ange devait vaincre, mais l’Homme était presque égal en force avec l’Ange, dans cette âme de prêtre, où l’humanité débordait !

Dieu, du reste, sous les yeux de qui eut lieu ce combat acharné et mystérieux, Dieu seul le vit distinctement ; mais Néel et Calixte le soupçonnèrent… Néel, qui avait assisté à la vision de Calixte, laquelle pour l’abbé avait été une révélation, et qui savait, — à n’en pouvoir douter, — combien cette révélation était vraie, entrevoyait l’état de l’âme du malheureux prêtre, et il s’en inquiétait d’autant plus que Calixte, tout exaltée qu’elle fût dans la joie que lui donnait son père, avait cependant remarqué le changement de l’abbé Méautis dans ses relations avec elle.

L’abbé, comme on le comprend bien, ne parlait jamais à Calixte de ce qui causait sa joie présente, à elle, et inondait sa vie et ses joues de pleurs aussi suaves que ceux qu’elle avait jusque-là versés étaient amers. Il ne lui tintait jamais un mot de son père ; et quand elle, sous l’impression des lettres qu’elle en recevait si souvent, lui parlait de cette grande foi revenue, de ce magnifique repentir, qui fait plus que de laver l’âme qui a péché, mais qui la glorifie, l’abbé restait dans un silence qu’elle