Aller au contenu

Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/281

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui tomba comme une quille et que je ne m’amusai pas à ramasser. « V’là pour la lettre que tu n’as pas voulu porter, — lui dis-je, — calotin ! » car leurs portiers ont des calottes ni plus ni moins que des abbés. Monsieur Néel m’avait ordonné de lui amener la meilleure bête de l’écurie. Il l’enfourcha avec sa soutane qu’il déchira en la retroussant et dont il jeta les morceaux au vent ! Je n’étais pas mal monté non plus, mais tout de même, j’eus peine à le suivre, quoique je fusse botté et éperonné !… Ah ! lui ! ses genoux et ses talons valaient mes éperons et mes bottes !

« Nous partîmes, raide comme balle ! mais dès que nous fûmes hors de la ville, v’là qu’il se mit la route à dos, prit la ligne droite, piqua par-dessus feuille, bravement ! et je fis comme lui, à cause de monsieur Néel. Qu’est-ce qu’il aurait dit de son vieux Bellet, si je m’en fusse revenu tranquillement par les routes, comme un meunier sur ses sacs ?… Seulement je puis affirmer et certifier que je fêtai là rudement ma cinquantaine de postillon, car il y a cinquante ans que je suis le cul sur la selle, pour votre service, monsieur le vicomte, — et le diable m’emporte si je pourrais recommencer de courir une telle poste, sans crever définitivement mon tambour ! »

.....Il y avait à peu près une heure que