Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/76

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maître s’en allait pour longtemps et partait ce soir !

— Ce soir ! fit Néel étonné et qui piqua des deux, sans rien ajouter davantage.

Quand il arriva au Quesnay, il trouva Sombreval et sa fille dans le salon. Calixte, debout devant la chiffonnière en bois de rose, nouait une couronne de pensées qu’elle venait d’achever et qu’elle avait prise à un monceau de fleurs éparses devant elle. C’était l’heure où d’ordinaire Sombreval était au travail.

— Eh bien ! monsieur Néel, — lui dit-il en le voyant entrer, — vous me trouvez aujourd’hui auprès d’elle. Hier, j’ai éteint mon fourneau pour ne plus le rallumer et fermé la porte de ce laboratoire où j’ai cherché si longtemps ce que le Dieu que j’ai offensé me donnera plus sûrement, sans doute, que cette science à laquelle je me fiais… Puisqu’il faut partir, je ne quitterai plus Calixte maintenant que pour partir. Je veux passer mes dernières heures auprès d’elle. Ce sont là les dernières saveurs de la coupe de ma vie qui sera vidée, lorsque je ne la verrai plus. Pauvre et sainte petite, elle a communié ce matin ! Nous revenons de l’église ; et voyez, monsieur de Néhou ! Elle a voulu fleurir le portrait de sa mère. Cher amour d’enfant qui pense à tout, et qui s’est dit que c’était au ciel la fête de sa mère,