Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/113

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ignominie d’une grossesse que madame de Ferjol, bien plus que Lasthénie, aurait voulu engloutir sous terre, car Lasthénie, à ce moment-là, ne croyait pas à sa grossesse… Dans la nouveauté de ses sensations, elle croyait à une maladie inconnue, aux symptômes trompeurs, et à une erreur monstrueuse de sa mère… Elle se révoltait contre cette erreur… Elle se débattait douloureusement sous l’insulte de l’idée de sa mère. Elle ne courbait pas la tête sous le déshonorant soufflet de ses reproches. Elle avait l’entêtement sublime de l’innocence… Et parce qu’elle ne ressemblait pas à cette mère passionnée, despotique et fougueuse, qui aurait rugi, comme une lionne, si elle eût été à la place de Lasthénie :

— Comme vous vous repentirez un jour de m’avoir fait tant souffrir, ma mère ! — lui disait-elle avec la douceur d’un agneau qui se laisse égorger.

Mais le jour dont elle parlait ne vint jamais, — et cependant beaucoup de jours passèrent entre cette mère sans miséricorde, qui ne pardonnait pas, — qui ne parlait