Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/116

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vie même de l’enfant qui, dans ce ventre, venait de bondir sous sa main !

— Il y a donc, — fit-elle, réfléchie, — plus honteux que la honte de ta grossesse. C’est la honte de l’homme à qui tu t’es donnée, puisque tu te tais.

Et l’idée qui lui était passée par la tête, un jour, du capucin — de l’étrange capucin, lui revint tout à coup, non pas comme à Agathe, la superstitieuse Agathe qui croyait aux sorts, mais comme à une femme qui ne croyait, elle, qu’aux sortilèges de l’amour, et qui en avait aussi été la victime… Pour elle, ce n’était pas une chose impossible qu’un amour caché sous une haine ou une antipathie menteuse, et dont la révélation éclatait dans le foudroiement d’une grossesse. Mais elle repoussait cette idée d’un crime qui, pour elle, devait être le plus grand de tous, puisqu’un prêtre l’aurait commis. Elle la repoussait encore plus par respect pour le caractère de l’homme de Dieu que par foi en l’innocence de sa fille. Elle savait, par son expérience personnelle, la fragilité de toute innocence ! Seulement, curieuse, opiniâtrement