Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/52

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oui, une pareille maison avait dû ajouter son reflet aux autres ombres d’où émergeait le front immaculé de Lasthénie…

Pour celui de Madame de Ferjol, rien ne pouvait en augmenter l’immobile tristesse. L’influence des lieux ne mordait pas sur ce bronze, verdi par le chagrin. Après la mort de son mari, qui avait toujours vécu de la vie plantureuse d’un gentilhomme riche, et d’habitudes aristocratiquement hospitalières, elle s’était tout à coup précipitée dans cette piété venue de Port-Royal et dont, à cette époque, la France des provinces portait encore l’empreinte. Tout ce qu’elle avait de femme disparut dans cette piété qui ne se pardonne rien et qui se mortifie. Elle appuya sur cette colonne de marbre son cœur brûlant, pour le refroidir. Elle éteignit le luxe de sa maison. Elle vendit ses chevaux et ses voitures… Elle congédia ses domestiques, ne voulant conserver auprès d’elle, comme une humble bourgeoise, qu’une seule servante du nom d’Agathe qui, depuis vingt ans, avait vieilli à son service, et qu’elle avait amenée de Normandie. Voyant cette réforme, les bonnes langues du bourg,