Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/67

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Il était d’ébène, et entre les dizaines noires, il y avait pour les séparer une tête de mort, en ivoire jauni, qui faisait la tête de mort, plus tête de mort encore par sa couleur, comme si elle eût été depuis plus longtemps déterrée.

Madame de Ferjol avança la main, — prit le chapelet avec respect, et après l’avoir regardé, le glissa sur le drap plié devant elle.

— Tiens ! dit-elle à sa fille.

Mais Lasthénie, en le prenant, sentit se crisper ses doigts et elle le laissa échapper. Étaient-ce les têtes de mort qui agissaient sur les nerfs de la trop sensible fillette ?…

— Garde-le pour toi, maman, — fit-elle.

Ô instinct ! instinct ! Le corps en sait parfois plus long que la pensée ! Mais Lasthénie, en ce moment, ne pouvait pas savoir la cause de ce que ses doigts charmants venaient d’éprouver.

Quant à la vieille Agathe, elle a toujours cru — avant comme après cette histoire — que le chapelet qui avait roulé dans les mains du redoutable capucin, et sur les grains duquel il avait laissé son influence, était