Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/268

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parviendrait presque, si l’on ne s’en rapportait qu’aux faits qu’il cite, si l’on oubliait que ces faits recueillis et morts dans l’histoire sont séparés de leur racine, c’est-à-dire de l’époque à laquelle ils se sont produits, et de l’esprit qui l’animait. Membre de cette illustre compagnie de Jésus pour laquelle on ne saurait avoir une trop profonde vénération, le P. Daniel a opposé la tradition scholaire d’un temps où l’Europe et la France étaient chrétiennes, comme, hélas ! elles ne le sont plus, aux esprits sévères qui croient aujourd’hui la foi et la civilisation perdues, si on ne refait pas l’homme dans son germe, c’est-à-dire dans son existence intellectuelle. Le docte historien nous raconte, avec un détail qui honore sa science et son talent d’exposition, ce que fut l’enseignement classique depuis le quatrième siècle jusqu’à Charlemagne et Alcuin, depuis Raban Maur jusqu’à Alexandre de Villedieu. et depuis le douzième siècle jusqu’à la Renaissance. Or, dans cette longue période, il le montre partout admis par l’autorité religieuse, qui n’avait qu’à dire un seul mot pour le supprimer. Il cite même à ce sujet les décisions du concile de Trente. Mais, selon nous, si les faits cités sont incontestables, nous croyons que le savant jésuite en a tiré de fausses conclusions ; et c’est surtout quand on a lu cette histoire des Études classiques que M. Saint-Bonnet paraît seul avoir saisi la question là où elle est réellement, c’est-à-dire dans l’état effrayant de la pensée européenne et dans la nature de l’esprit humain.

Et nous le répétons en finissant : il n’y a que là en effet qu’on puisse trouver la raison sans réplique qui domine tout le débat rappelé par nous aujourd’hui. Partout