Page:Barbier - Satires et Chants, 1869.djvu/193

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

 
Autrefois, indigné de voir régner le mal,
Avec l’iambe ardent j’essayai Juvénal,
Et, le poignet armé d’une plume sévère,
Aux noirs excès du temps je déclarai la guerre.
Aujourd’hui, moins rigide et peut-être moins bon,
Je satirise encor, mais sur un autre ton.

Quittant de Némésis la sublime folie,
Je prends modestement le masque de Thalie ;
Et soudain me voilà réglant mes faibles pas
Sur ceux du tendre ami du noble Mœcenas,
Et cherchant de mon mieux à retrouver la trace
Que dans les champs latins laissa jadis Horace.

Imiter de nos jours même Horace, à quoi bon ?
De votre propre vin versez-nous, dira-t-on.
Imiter, pourquoi pas ? Que l’on est difficile
À cette heure ! Autrefois l’on était plus habile.
Avec moins de fierté, nos aïeux sans remords
Savaient mettre à profit les richesses des morts,
Et ces naïfs amants de l’antique science
S’estimaient très-heureux si leur intelligence
Réussissait à faire entrer dans leurs écrits,
Vivantes, les beautés de quelques vieux esprits.