Page:Barbier - Satires et Chants, 1869.djvu/200

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portant Et qui, loin de tuer, le fait vivre d’autant.

De son feu bien nourri jamais on ne se lasse, Et le tiré toujours au tireur en rend grâce. Use donc de cette arme avec brutalité, Sans crainte d’être extrême en ta duplicité. Tu connais Filoutin, ce vieux célibataire Qui demeure au marais en hibou solitaire ?

Bertrand. Oui, c’est un fier coquin, des écus amoureux, Qui trente ans monnaya le cœur des malheureux, Et qui, fourré souvent dans mainte sale affaire, Au dire du palais empoisonna son frère, Un gueux qui plus que nous mérite sûrement Les charmantes douceurs de l’emprisonnement.

Macaire. Eh bien, si le destin jamais te fait la grâce, Cher Bertrand, d’amener pareil homme en ta nasse, Il faut effrontément être son louangeur Et jusque sur les toits soutenir son honneur.

Bertrand. Robert, quoique je sois large de conscience, Ce rôle-là pourtant passe ma complaisance.

Macaire. Alors va mendier ! Comme un chien, jours et nuits T’abreuver aux ruisseaux.

Bertrand. Vivre ainsi ! Je ne puis…

Macaire. Soumets-toi donc, mon cher, sans scrupule et sa