Mais puisqu’à votre hymen Brutus a consenti,
Je suis heureux, ma fille, à la fin je respire ;
Je ne craignois que lui, puisqu’il faut vous le dire,
Et quoiqu’il me fût cher & qu’il fût mon ami,
A le voir seulement j’ai mille fois frémi.
Ah ! Seigneur, je frémis moi-même à vous entendre,
D’un noir présentiment j’ai peine à me deffendre.
Ces troubles qu’un objet en nous vient exciter,
Sont des avis des Dieux dont on doit profiter.
Brutus m’épouse, ô Ciel ! que n’ai-je point à craindre
D’une ame si longtems instruite en l’art de feindre ?
Vous formez entre nous d’indissolubles nœuds,
Qu’allons-nous devenir s’il nous trompe tous deux ?
Que seroit-ce, grands Dieux ! si la triste Octavie
Découvroit des complots, & contre votre vie ?
Par ma bouche, Seigneur, seroient-ils déclarés ?
Ses intérêts alors me seroient trop sacrés.
Qu’entens-je ! si Brutus un jour tramoit ma perte,
Malgré sa perfidie à vos yeux découverte,
Vous pourriez sans remords le laisser achever.
Je répons de mourir, mais non de vous sauver.
C’est, donc là tout le fruit d’un si triste Hymenée :
N’importe, poursuivons, ma parole est donnée ;