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TOMYRIS,

Ces voiſins qui ſans eux n’étoient que trop puiſſans ?
Toujours la liberté fut chere aux Maſſagetes.
Non, pour porter des fers nos mains ne ſont point faites,
Gélonide, & je crus qu’il falloit prévenir
Un malheur que mes yeux liſoient dans l’avenir.
Tout me favoriſoit. Frapé de jalouſie,
Créſus contre Cyrus armoit toute l’Aſie.
Je prens ce tems heureux, j’aſſemble des vaiſſeaux ;
Spargapiſe eſt chargé de traverſer les flots :
Il s’embarque, & ſuivi d’une nombreuſe eſcorte,
Mouille devant Sinope, où l’Euxin le tranſporte.
Des douceurs du repos Cyaxare enyvré,
A ce revers du ſort n’étoit point préparé.
Dénué de Soldats, que peut-il entreprendre ?
Il ſonge à ſe ſauver ne pouvant ſe défendre.
Il fuit, il abandonne, agité de frayeur,
La Princeſſe ſa fille au pouvoir du Vainqueur :
Ainſi, de tant d’Etats l’orgueilleuſe Héritiere
Au milieu de ſa Cour, devint ma priſonniere ;
Et conduite en ces lieux par les ſoins de mon Fils,
Le deſtin de l’Aſie en mes mains fut remis.
Les armes à la main, Cyrus nous la demande ;
Mais il en frémira s’il faut que je la rende.

Gelonide.

Vous pourriez…

Tomyris.

Vous pourriez… Il ſuffit ; & bientôt tu vas voir
Ce que peut Tomyris réduite au deſeſpoir.