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LA MORT

Ces champs ſemés de morts, ce théatre d’horreur,
Et tout ce qu’a d’affreux une guerre inteſtine,
N’aproche pas des maux que la paix nous deſtine.
Malgré tant de malheurs, Reine de l’Univers,
Rome donnoit des loix, on lui donne des fers.

Cesar.

Que parlez-vous de fers ? Quel eſt donc ce langage ?
Eſt-il rien ſous mes loix qui ſente l’eſclavage ?
Ah ! ſi votre Pompée eût été mon vainqueur…
Je ne ſçai quels projets il rouloit dans ſon cœur :
Mais les Dieux l’ont jugé, leur ſageſſe équitable
Montre aſſez qui de nous étoit le plus coupable.

Porcie.

Et d’un éclat ſi vain on croit fraper mes yeux :
Caton ſeul dans mon cœur balance tous les Dieux.
Par le deſtin Pompée en vain s’eſt vu proſcrire,
Caton vous condamna, c’eſt à moi d’y ſouſcrire ;
Comment de cet Arrêt puis-je me défier !
Vous prenez trop de ſoin de le juſtifier,
Et déja ſur les cœurs portant la tyrannie…
Mais ne vous flattez pas de la voir impunie :
Ce Brutus à vos loix en eſclave aſſervi,
Quelqu’autre peut l’ôter à qui me l’a ravi,
Vous vous répentirez d’en avoir fait un traître ;
Il trahit ſa Maîtreſſe, il trahira ſon Maître :
Et ſi le Ciel m’entend, s’il daigne m’exaucer,
Vous l’aprochez du cœur que ſa main doit percer.

Cesar.

O Dieux ! quelle fureur ! chaque moment l’augmente :