Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/51

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ses bras indistincts et maladroits, sans bien oser la regarder.

Elle, déjà femme, elle a posé en arrière, sur le dossier, sa figure aux yeux luisants un peu grasse et toute rose, teintée et attiédie par son cœur ; la peau de son cou, satinée et tendue, palpite ; c’est, entre son visage et son sein, le point précieux et délicat de sa pulsation. Demi-close, attentive, un peu voluptueuse de ce qui, d’elle, émane déjà de volupté, elle semble une rose qui se respire. On voit jusqu’aux genoux ses jambes fines, aux bas de fil jaune, sous la robe qui enveloppe son corps en le présentant, comme un bouquet.

Et moi, je ne pouvais détacher les yeux de leurs gestes, et je buvais ce spectacle, la figure collée à leur groupe comme un vampire.

Après le long silence, il murmura :

— Veux-tu que nous nous disions « vous » ?

— Pourquoi ?…

Il sembla s’absorber dans un effort d’attention.

— Pour recommencer, dit-il enfin.

Il répéta :

— Voulez-vous ?

Elle tressaillit visiblement au contact de cette forme nouvelle de sa parole, sous le mot : « vous », comme sous une espèce de premier baiser.

Elle hasarda :