Page:Barbusse - Le Feu : journal d’une escouade.djvu/113

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Barque, tout en se frottant les reins, interpelle un des équipiers forcenés :

— Penses-tu y arriver, vieux canard ?

— Nom de Dieu ! brame celui-ci, tout à son affaire, gare à ce pavé ! Vous allez m’fusiller ma bagnole !

Dans un brusque mouvement il bouscule à nouveau Barque, et, cette fois, le prend à partie :

— Pourquoi qu’t’es là, dedans d’fumier, outil !

— Non, mais tu s’rais pas alcoolique ? riposte Barque. Pourquoi qu’j’suis là ! Elle est bonne, celle-là ! Dis donc, bande de poux, tu m’la copieras !

— Rangez-vous ! crie une voix nouvelle qui conduit des hommes pliés sous des faix disparates mais pareillement écrasants…

On ne peut plus rester nulle part. On gêne partout. On avance, on se disperse, on recule dans cette mêlée.

— En plus, j’le dis, continue Cocon, impassible comme un savant, il y a les Divisions, organisées chacune à peu près comme un Corps d’Armée…

— Oui, on sait, passe la main !

— Il en fait un chambard, c’tréteau, dans son écurie à roulettes, constate Paradis. Ça doit être la belle-mère d’un autre.

— C’est, j’parie, l’tétard du major, çui que l’véto disait qu’c’était un veau en train de d’venir une vache.

— C’est bien organisé tout d’même, tout ça, y a pas à dire ! admire Lamuse, refoulé par un flot d’artilleurs portant des caisses.

— C’est vrai, concède Marthereau, pour conduire tout c’fourbi à la voile, faut pas être une bande de navets, et pas non plus une bande de flans… Bon Dieu, fais attention où c’que tu poses tes ribouis maudits, peau d’tripe, bête noire !

— Tu parles d’un déménagement. Quand j’m’ai installé à Marcoussis avec ma famille, ça a fait moins d’chichi. C’est vrai qu’j’suis pas chichiard non plus.

On se tait et alors on entend Cocon qui dit :