Page:Barchou de Penhoën - Histoire de la conquête de l’Inde par l’Angleterre, tome 4.djvu/289

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blait maîtresse d’elle-même, mais lorsque la flamme s’éleva tout-à-coup du bûcher avec un grand bruissement, alors le courage l’abandonna. On la vit se tordre et se débattre dans ses horribles tortures au milieu des mains vigoureuses qui la retenaient, tandis que ses cris s’allaient perdre parmi les hurlements enthousiastes de la multitude. Après de longues convulsions, elle reprit pourtant assez ses esprits pour accomplir, lorsque le corps eut été consumé, la cérémonie des ablutions dans la Nerbudda. Elle se retira ensuite dans son palais, où elle demeura trois jours entiers sans pouvoir prendre de nourriture, sans prononcer une parole, immobile, et absorbée dans sa douleur. Elle n’eut de consolation qu’en bâtissant un magnifique tombeau à cette fille, qu’elle ne cessa de pleurer.

Ahalya-Bae mourut à l’âge de soixante ans, fatiguée, épuisée par les soins du gouvernement, suivant quelques uns par une observance trop sévère des pratiques de sa religion. Jusqu’à sa dernière heure, sa contenance aimable, enjouée, manifesta cette bonté de cœur qui lui avait été naturelle toute sa vie. Elle était douce, humaine, généreuse, facile ; mais dans les rares occasions qui provoquaient sa colère, son regard, dit-on, faisait baisser les yeux des plus hardis de ses serviteurs et de ses généraux. Elle avait l’esprit plus cultivé que ne l’ont ordinairement les femmes de l’Inde. Elle lisait et comprenait les pouranas, son étude favorite. On la re-