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Page:Barckhausen - Montesquieu, l’Esprit des lois et les archives de La Brède, 1904.djvu/47

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volumes de l’édition de 1748 avec un exemplaire imprimé de nos jours, on s’aperçoit que ce dernier intervertit l’ordre de certains chapitres, en divise un des plus longs en quatre remaniés, et même en ajoute six ou sept de toute pièce.

Parmi ces additions, nous n’en relèverons qu’une, celle du chapitre ix au livre XV. Elle fut provoquée par une observation de Grosley, l’érudit de Troyes, en Cham- pagne. Nous y voyons qu’en France, au xviiie siècle, on entendait dire tous les jours qu’il serait bon que », dans le pays, « il y eût des esclaves ». Mais c’est la conclusion du morceau qui lui donne de l’importance. Il est, en effet, possible qu’elle ait inspiré à Kant l’idée du précepte essentiel de sa morale[1].

Pour en revenir aux papiers de La Brède, on y trouve des feuilles, grandes et petites, indiquant les améliorations que Montesquieu songeait à apporter à son chef-d’œuvre. Il en est beaucoup qu’il réalisa soigneusement ; d’autres auxquelles il ne donna pas suite. On rencontre, par exemple, dans un dossier tout un chapitre encore inédit, et destiné au livre XXII, sur l’usure que les Romains pratiquaient dans les provinces.

Cette question de l’usure à Rome semble avoir infini- ment tracassé notre auteur. L’étranger qui mit en anglais ses Considérations avait critiqué, dans sa préface, quelques passages de l’Esprit des Lois relatifs aux lois romaines sur le prêt à intérêt et sur les droits successoraux des femmes. Montesquieu s’en émut au point de dicter le mémoire en réponse qui a été mis au jour dans ses Mélanges. Toutefois, de son vivant, on ne fit point de changements au texte imprimé des chapitres qui étaient en cause. C’est dans l’édition de 1758 qu’apparurent,

  1. Voici la fin du chapitre : « Dans ces choses voulez-vous savoir si les désirs de chacun sont légitimes ? Examinez les désirs de tous. »