Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/110

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Ces deux vers, et quelques autres, semblent indiquer qu’il y a eu mélange, et comme confusion, dans les regrets de Musset, pendant qu’il écrivait la Lettre à Lamartine. Quoi qu’il en soit, la pièce est d’une veine poétique moins pure, moins égale, que les Nuits. A côté de morceaux devenus classiques (Lorsque le laboureur,… Créature d’un jour…), de vers qui sont de vrais sanglots (O mon unique amour…), il y a des parties de rhétorique dans le début sur Byron et dans les louanges adressées à Lamartine.

La fin est d’un vif intérêt pour le biographe. C’est la première fois, depuis les chagrins qui l’ont changé et mûri, que Musset nous livre sa pensée sur les questions fondamentales dont la solution est la grande affaire de l’être pensant. Il commence par adopter sans examen le Dieu de Lamartine, ce qui est peut-être une simplification un peu trop grande :

    Quel qu’il soit, c’est le mien ; il n’est pas deux croyances.
    Je ne sais pas son nom, j’ai regardé les cieux ;
    Je sais qu’ils sont à lui, je sais qu’ils sont immenses,
    Et que l’immensité ne peut pas être à deux.

Il célèbre ensuite les relations de l’âme humaine avec l’infini, dans des strophes d’une grande élévation. Le poète a été récompensé d’avoir puisé cette fois son inspiration aux sources éternelles, que ne trouble pas le limon des passions terrestres :

    Créature d’un jour qui t’agites une heure,
    De quoi viens-tu te plaindre et qui te fait gémir ?
    Ton âme t’inquiète, et tu crois qu’elle pleure :
    Ton âme est immortelle et tes pleurs vont tarir.
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