Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/129

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Florence, par son cousin Lorenzo, et l’inutilité de ce meurtre pour les libertés de la ville. Quelques flâneries dans Florence donnèrent le cadre. Un singulier mélange d’intuitions historiques et de souvenirs personnels fit le reste. Paul de Musset dit, dans Lui et Elle, que la pièce fut écrite en Italie. Il faut donc que ce soit à Venise, en janvier 1834, dans les trois ou quatre semaines qui s’écoulèrent entre l’arrivée d’Alfred de Musset et sa maladie.

L’action de Lorenzaccio met sous nos yeux une révolution manquée, avec tout ce qu’elle comporte d’intrigues et de violences, dans l’Italie brillante et pourrie du XVIe siècle. Au travers de ces agitations, que Musset a peintes avec beaucoup de couleur, une sombre tragédie se déroule dans une âme éperdue, qu’elle remplit d’horreur et de désespoir. C’est encore une fois l’histoire de l’irréparable dégradation de l’homme touché par la débauche :

   La mer y passerait sans laver la souillure.

Lorenzo de Médicis est un républicain de 1830, idéaliste et utopiste. Il croit à la vertu, au progrès, à la grandeur humaine, au pouvoir magique des mots. Il avait vingt ans quand il vit passer le démon tentateur des rêveurs de sa sorte : « C’est un démon plus beau que Gabriel : la liberté, la patrie, le bonheur des hommes, tous ces mots résonnent à son approche comme les cordes d’une lyre, c’est le bruit des écailles d’argent de ses ailes flamboyantes. Les larmes de ses yeux fécondent la terre, et il tient