Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/92

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voilà la seule chose sûre qu’il y ait entre nous. Le temps et l’absence ne nous ont pas empêchés et ne nous empêcheront pas de nous aimer. Mais notre vie est-elle possible ensemble ? » Elle lui propose de se séparer, définitivement ; ce serait le plus sage à tous les égards : « Je sens que je vais t’aimer encore comme autrefois, si je ne fuis pas. Je te tuerai peut-être, et moi avec toi. Penses-y bien. Je voulais te dire d’avance tout ce qu’il y avait à craindre entre nous. J’aurais dû te l’écrire et ne pas revenir. La fatalité m’a ramenée ici. Faut-il l’accuser ou la bénir ? Il y a des heures, je te l’avoue, où l’effroi est plus fort que l’amour…. »

Musset se lassa le premier. La rupture vint de lui. Le 12 novembre, il l’annonce à Alfred Tattet. Sainte-Beuve, qui était alors le confident de George Sand, est aussi informé officiellement. Tout devrait être fini, et cependant les orages passés ne sont rien, moins que rien, auprès de ceux qui s’apprêtent. On dirait un de ces châtiments impitoyables où les anciens reconnaissaient la main de la divinité, et l’on n’a plus que de la compassion pour ces malheureux qui se débattent dans l’angoisse avec des cris de douleur.

George Sand était retournée à Nohant, et elle avait éprouvé tout d’abord un sentiment de délivrance et de repos : « Je ne vais pas mal, je me distrais et ne retournerai à Paris que guérie et fortifiée. J’ai lu votre billet à Duteil. Vous avez tort de parler comme vous faites d’Alf. N’en parlez pas