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LES PRINCIPAUX THÈMES BOULANGISTES

lement eux-mêmes le jugeaient fini. Les circonstances qui pouvaient le servir avaient passé. – Suret-Lefort se rapprocha de Bouteiller et il ricanait en parlant du « pauvre Boulanger ».

À la fin de 1887, L’ancien ministre de La Guerre regagne son commandement de Clermont, averti jusqu’à la nausée sur ces hommes. Dans l’armée, les camaraderies trompent peu ; ce jeune général cordial, après deux années, n’accepte pas encore trahison, reniements, mensonges comme de la politique normale. Au sentiment des injures, il joint une juste appréciation de ce parlementarisme où l’on distribue les places sans tenir compte du talent, où l’on pousse aux événements sans souci de l’avenir, sacrifiant toujours le bien public à des intérêts privés. Maintenant, elle vit avec une domination singulière dans son esprit, la phrase que répétait Naquet aux déjeuners chez Durand : « Un régime où tout est instable, où nul n’est sûr du lendemain. » En somme, la phase parlementaire, très courte chez Boulanger, lui aura été une espèce de maladie bienfaisante d’où il sort plus national. Ce fut par une nécessité de situation qu’il se prêta quelques jours à un parti. Il dut au radicalisme le moyen d’être populaire. Maintenant, par les circonstances qui le séparent de M. Clemenceau, par la marche naturelle de sa pensée, par horreur du verbalisme et des mensonges du Palais-Bourbon, il s’épure et rejette le joug de ces coteries qui n’ont rien fait, pour relever la France.

Délibérément il s’occupe de rassembler toutes les bonnes volontés ; il les mobilise sur des points séparés, eu ne les occupant que d’elles-mêmes et sans les renseigner sur le plan d’ensemble qu’à leur