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JOURNÉE D’AGONIE DE REINACH

du Cabinet et d’un chef parlementaire qui assistent un banquier voleur ?

Coupons au court. Ces messieurs prétendent avoir ignoré que, depuis le 4 novembre, leur ami était inculpé. Mais, dans son discours du 13 décembre, Rouvier avouera implicitement qu’il a connu l’inculpation. Voici sa phrase : « Dans la journée du 18 novembre, c’est-à-dire quatre jours après que le gouvernement eut autorisé le parquet à poursuivre… » Ainsi l’autorisation fut examinée en conseil des ministres ; Rouvier la combattit vigoureusement à plusieurs reprises, et il n’aurait pas demandé : « Qui poursuit-on ? » Allons donc ! le grave souci qui met en chasse MM. Clemenceau et Rouvier, ce n’est pas d’adoucir un Ducret. Ce n’est même point de sauver un Reinach. Ils s’efforcent de rattraper des documents terribles et de les enterrer avant l’explosion imminente.

Cornelius recommence l’opération qui, une fois déjà, lui réussit. En juillet 1888, il a télégraphié en clair à Reinach : « Il faut payer ou vous sauterez, vous et vos amis », et Clemenceau, accompagné de Ranc, a pressé le ministre Freycinet d’agir sur M. de Lesseps pour qu’il fournît l’argent et mît Reinach en mesure de satisfaire Herz. Eh bien ! en octobre-novembre 1892, nous assistons à une répétition de cette manœuvre. Herz promène çà et là le fameux document écrit par Jacques de