Page:Barrès – Leurs Figures.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
240
LEURS FIGURES

Sturel n’avait pas attendu le prononcé du jugement pour causer des mesures à prendre avec M. Andrieux.

Il trouva au 32 de l’avenue Friedland un rassemblement de reporters. La terreur qu’inspirait Andrieux faisait de ses pensées un des objets principaux de la curiosité publique. Les journaux assiégeaient sa porte. Il groupait leurs envoyés, amis ou ennemis, et leur dictait, en marchant, de brèves notes, où son grand art de polémiste et même de mystificateur ménageait d’immenses effets à de petites révélations. Sturel entra pour entendre cette conclusion :

— Comme le marin qui aurait pêché un requin, je regarde, messieurs, expirer la bête sur le pont. Tant qu’elle se borne à jeter sur ma botte sa bave sanglante, j’attends la fin. Mais pas de coup de queue, s’il vous plaît, ou gare la hache ! Là-dessus Andrieux galamment donna le signal du départ. La pièce vidée, Sturel dit à l’ancien préfet de police que l’heure semblait venue de la prendre, la hache. Il fallait publier la liste des chéquards.

— Parfaitement, dit Andrieux, une brochure, avec les adresses ! Nous aurons le Tout-Paris de la corruption, et le volume prendrait place dans la bibliothèque des financiers véreux en quête de concessions.

Andrieux et Sturel, comme tous les agissants